La nouvelle VAE : textes adoptés

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Après 20 années d’existence, la VAE entame sa mue. Le cap fixé et celui d’une VAE « nouvelle formule » : simplifiée, assouplie et ouverte au plus grand nombre.

La volonté est de placer la VAE au cœur même du modèle de la formation continue et de « faciliter les évolutions et les reconversions professionnelles ».

Le déploiement de cette réforme est attendu pour la fin 2024 et vise comme objectif le nombre de 100 000 VAE par an, à horizon 2027.

Ce chapitre se propose de rassembler de façon synthétique les principales évolutions apportées au dispositif, au gré des publications officielles et des travaux législatifs.

Premier acte : les nouveautés introduites par la loi du 21 décembre 2022

Entérinée par le Sénat le jeudi 17 novembre 2022, la loi n° 2022-1598 du 21 décembre 2022 portant sur « les mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi » a été publiée au Journal officiel le 22 décembre 2022.

warning_amber Cette loi introduit de nombreuses nouveautés en matière de VAE. Toutefois des décrets d’application sont encore en attente. Par conséquent, d’ici la parution de ces éléments, et durant cette phase de transition, les deux parcours VAE cohabitent : la VAE dite « classique » et la VAE « nouvelle formule ».

Les candidats souhaitant entreprendre un parcours VAE dont la certification est référencée sur le portail « France VAE » doivent obligatoirement s’inscrire via cette plateforme.

Si les candidats visent une certification qui n'est pas encore référencée sur « France VAE », ils sont invités à suivre le parcours « classique de VAE ». Dans ce cas, les règles habituelles en matière de VAE continue de s’appliquer (cf. chapitre "Qu'est-ce que la VAE ?").

Extension du champ de la VAE

La loi du 21 décembre 2022 ouvre le champ de la VAE. Dorénavant, la VAE n’est plus réservée aux personnes actives, ou à une catégorie de personnes, ni à un type d’activité (bénévole, syndicale, salariée…). Elle sera accessible « à toute personne qui justifie d’une activité en rapport direct avec le contenu de la certification visée ».

Il sera également possible de viser un ou plusieurs blocs de compétences d’une certification, au lieu de sa totalité ; à la condition que la certification soit inscrite au RNCP.

Animation du dispositif

La loi du 21 décembre 2022 acte la création d’un service public de la VAE, porté par un groupement d’intérêt public associant l’État, les Régions, Pôle emploi, l’Afpa, les opérateurs de compétences et les associations Transitions Pro.

Ce service public aura pour mission :

  • « l’information des personnes et leur orientation dans l’organisation de leur parcours »,
  • la promotion de la VAE,
  • l’animation et la cohérence des pratiques en territoire,
  • ainsi que le suivi statistique de la VAE.

Ainsi que la gestion d’une plateforme numérique, future porte d’entrée unique de la VAE 

Mise en œuvre du nouveau parcours VAE

La notion de « parcours VAE » est définie comme un parcours intégrant des « actions d’accompagnement » ainsi que « des actions de formation (…) ou des périodes de mise en situation professionnelle ».

Les périodes de stage, de formation initiale ou continue en milieu professionnel, les périodes de mise en situation en milieu professionnel pourront être prises en compte.

La phase administrative de recevabilité est supprimée, afin de simplifier le processus.

Les règles de composition et d’organisation des jurys sont amenées à évoluer.

La durée du congé VAE est doublée passant de 24 à 48h. Il sera également possible d’abonder ce congé en cas de prédispositions prévues par accord collectif (national interprofessionnel, de branche ou d’entreprise).

Le rôle d’intermédiaire de Transitions Pro concernant le financement de la VAE est confirmé. Une prise en charge d’un montant forfaitaire dans la limite de 3 000 euros pourra potentiellement être mobilisée, pour couvrir les frais de positionnement, d’accompagnement  et de préparation au jury.

Une expérimentation baptisée « VAE inversée » permettra de « favoriser l'accès à la certification et à l'insertion professionnelles dans les secteurs rencontrant des difficultés particulières de recrutement, pour une durée de trois ans (…) les contrats de professionnalisation conclus par les employeurs de droit privé peuvent comporter des actions en vue de la validation des acquis de l'expérience. »

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Second acte : lancement de l’expérimentation « VAE inversée »

Prévue par la loi n° 2022-1598 du 21 décembre 2022, le décret n° 2023-408 du 26 mai 2023 vient préciser les modalités de cette expérimentation.

La « VAE inversée » vise à accompagner les reconversions professionnelles et à répondre aux difficultés de recrutement des entreprises.

La « VAE inversée » est adossée à un contrat de professionnalisation dérogatoire. Elle propose un accompagnement individualisé, un parcours de formation en situation de travail et donne lieu à la délivrance d’une certification ou à des blocs de compétences.

Contenu et mise en œuvre du contrat

La durée du contrat de professionnalisation associant des actions de validation des acquis de l'expérience ne peut excéder 36 mois.

Le contrat associe trois modalités d'acquisition des compétences devant s'articuler entre elles :

  • des enseignements généraux, professionnels et technologiques : ils peuvent être réalisés intégralement ou partiellement à distance et/ou en action de formation en situation de travail, au sein d'un organisme de formation ou au sein de l'entreprise notamment lorsqu'elle dispose d'un service de formation interne,
  • une activité professionnelle en entreprise : elle permet au bénéficiaire d'intégrer une entreprise, d'exercer une activité professionnelle et d'acquérir de l'expérience, tout en poursuivant le renforcement des compétences acquises dans le cadre de la composante de formation,
  • un accompagnement à la validation des acquis de l'expérience permettant la valorisation des compétences acquises au cours du contrat ou lors d'expériences professionnelles ou personnelles antérieures.

Le contrat peut comporter des périodes d'acquisition d'un savoir-faire dans plusieurs entreprises.

Une expérimentation ouverte à 5 000 candidats durant 3 ans

Cette expérimentation cible en priorité les secteurs en tension « rencontrant des difficultés particulières de recrutement », comme le BTP, ou la logistique. Un appel à projets national identifiera les secteurs en question. L’expérimentation est ouverte à 5 000 candidats et se conclura le 28 février 2026.

La VAE inversée permet au candidat d’obtenir une certification complète ou bien de viser certains blocs de compétences.

Le parcours du candidat ne peut excéder 36 mois.  

Publics éligibles

Ce dispositif s’adresse à toute personne âgée de seize ans révolus et plus. Il cible en priorité les demandeurs d’emploi, les bénéficiaires des minima sociaux, de l’AAH et les salariés en reconversion.

Prise en charge financière de l’accompagnement

Autre nouveauté par rapport au contrat de professionnalisation « classique », la prise en charge de l’accompagnement du parcours ne peut excéder 9 000 €. Ce montant varie selon la nature de l’accompagnement proposé et les actions entreprises.

  • les frais de conception et de coordination du parcours (dans la limite de 1 000 €),
  • les frais pédagogiques (dans la limite de 6 000 €),
  • les frais d’accompagnement à la VAE dont les frais d'examen du dossier de recevabilité, les frais d'accompagnement du candidat et les frais de session d'évaluation (dans la limite de 2 000 €),
  • les frais annexes liés à l'hébergement, restauration, transport (dans la limite de 3 000 €),
  • les dépenses de l'entreprise à destination du tuteur et du formateur en cas de formation en situation de travail.

Modalités de candidature des porteurs de projets

Les porteurs de projets souhaitant participer à cette expérimentation (entreprises, branches professionnelles, Opco, consortiums, acteurs de l’emploi, de la formation et de l’accompagnement à la VAE…) doivent adresser leurs candidatures à la DGEFP à l’adresse suivante : xp-cprovae@emploi.gouv.fr. Ils sont invités à détailler :

  • les besoins en recrutement et les difficultés rencontrées,
  • la capacité des certifications, blocs de compétences ou qualifications professionnelles à répondre à ces besoins,
  • les modalités de parcours envisagés,
  • les entreprises et structures partenaires (pour le sourcing des candidats, l’établissement des contrats de professionnalisation…),
  • les modalités de financement des parcours,
  • ainsi que la composition de l’équipe en charge du projet.

L’arrêté du 26 juin 2023 précise les modalités de candidature et les conditions de sélection des projets.

Après validation du projet par la DGEFP, le contrat sera transmis à l’Opco de référence. Ces contrats seront pris en charge par les Opco au titre de l’alternance.

En cas de non-réponse par la DGEFP pendant deux mois suivant la réception de la fiche projet dûment complétée, il faudra considérer la demande comme rejetée.

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Troisième acte : le décret du 27 décembre 2023

Un pas important en direction de la nouvelle VAE vient d'être franchi avec la publication du décret du 27 décembre 2023.

Ce second décret vient compléter la loi n° 2022-1598 du 21 décembre 2022 portant sur « les mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi ».

Ce nouveau décret présente :

  • les missions assurées par France VAE via le portail dématérialisé,
  • les modalités de collecte, de traitement des données pour l'orientation et le suivi des candidats,
  • le nouveau processus VAE,
  • le rôle des Architectes Accompagnateurs de Parcours,
  • le process de validation et le rôle du ministère ou de l'organisme certificateur.

Missions du service public de la VAE et du portail

Ce décret acte la création d'un nouveau service public. Cette mission sera assurée en majeure partie par le portail numérique de France VAE.
Le portail aura la responsabilité d’assurer :

  • l’information des candidats,
  • la gestion des demandes d'inscription,
  • le suivi du parcours du candidat,
  • la mise en relation avec un professionnel ayant en charge l’accompagnement des candidats (le candidat est libre de recourir ou non au service d’un Architecte Accompagnateur de Parcours),
  • la prise en charge financière des frais liés au parcours,
  • la gestion des notifications de recevabilité,
  • l'inscription des candidats aux jurys,
  • la conduite d’enquêtes et de suivi statistique.

Nombre de certifications visées par an

Un candidat ne peut soumettre au cours de la même année civile plus d'un dossier pour une même certification professionnelle ; ou plus de trois dossiers pour des certifications professionnelles différentes.

Il n’y a pas de limite fixée lorsque le candidat vise un ou des blocs de compétences.

Prise en charge financière des frais d'accompagnement

La prise en charge financière des frais d'accompagnement sera assurée par le GIP. Le candidat pourra également bénéficier de co-financements par les membres constitutifs du GIP, « par d'autre financeurs » ou en mobilisant son Compte Personnel de Formation.

Définition de la phase de recevabilité

Autre nouveauté introduite par le décret, la phase dite « d'examen de la recevabilité » est dorénavant définie. Cette dernière devra « permettre de vérifier le caractère suffisamment adéquat des activités précédemment exercées (…), des formations qu’il a suivies et des blocs de compétences dont il a obtenu la validation, ou dont il est susceptible de l’obtenir à l'issue d'une formation en cours, avec le référentiel de la certification visée ».

Accompagnement du candidat dans son parcours

Le décret détaille également les missions confiées à l’Architecte Accompagnateur de Parcours. On notera que le terme « d’Architecte » n’est pas à proprement parlé repris dans le décret.

Le texte prévoit que le recours à cette prestation soit facultatif et qu’il s’effectue à la demande du candidat. Pour cela, une liste de professionnels est mise en ligne sur le portail numérique de France VAE.

En cas de manquement, France VAE pourra retirer de cette liste les professionnels ne respectant pas les obligations liées à leurs missions.

Il reviendra à ce professionnel d’émettre un avis sur l’adéquation des éléments transmis par le candidat dans le cadre de l’examen de la recevabilité de la demande de validation.

Il pourra également effectuer des démarches administratives pour le compte du candidat, en ajoutant à son dossier les pièces justificatives nécessaires. Il lui reviendra entre autre la responsabilité de mobiliser les financements nécessaires à la réalisation du parcours.

Enfin, l’Architecte pourra conseiller au candidat des formations complémentaires utiles à la certification, au bloc visé ou afin de le préparer à son évaluation en jury.

Process de validation et rôle du ministère ou de l'organisme certificateur

1) Le ministère ou l'organisme certificateur se prononce sur la base d'un dossier sur la « recevabilité de la demande de VAE » déposé par le candidat ou son accompagnateur.

Ce dossier comporte les informations suivantes : la certification ou le bloc de compétences visé, l’identité du candidat, ses expériences, ses activités, ses formations, ainsi que l’avis émis par son accompagnateur. Un modèle de dossier sera prochainement fixé par un arrêté du ministre en charge de la formation professionnelle.

Le ministère ou l'organisme certificateur peut inviter le candidat à régulariser son dossier si des pièces sont manquantes.

Le ministère ou l'organisme certificateur dispose alors de deux mois après la réception du dossier complet pour se prononcer. En cas d’absence d’avis de la part du ministère ou de l’organisme certificateur, le dossier est jugé recevable.

L’analyse du dossier de recevabilité peut mentionner les écarts entre les expériences et les activités déclarées par le candidat et le référentiel de la certification visée et procéder à des recommandations, notamment à des formations complémentaires utiles.

A l’issue de cette acceptation, le candidat dispose de 6 mois pour effectuer les démarches définies dans le cadre de son parcours VAE. Au-delà des 6 mois sans actions entreprises, la demande de recevabilité sera jugée caduque.

2) En cas de décision favorable, le candidat peut alors constituer son « dossier de validation » à l'attention du jury, avec l'aide facultative « de la personne en charge de son accompagnement ».

Ce dossier de validation est élaboré à l’attention du futur jury.

Il comprend « la description des compétences et connaissances mobilisées au cours de son expérience dans les différentes activités qu’il a exercées ou acquises au cours de formations ».

3) Il revient au certificateur de fixer les modalités et la date de présentation du candidat devant le jury. Cette présentation doit intervenir avant la fin du troisième mois qui suit le dépôt du dossier de validation. Le résultat de l'évaluation est notifié par le ministère ou l'organisme certificateur dans les quinze jours suivant le passage devant le jury. En cas de validation partielle, le jury doit préciser le ou les blocs de compétences acquis.

Le candidat peut alors demander au ministère ou l'organisme certificateur les attestations relatives à la certification ou aux blocs obtenus.

En cas de présence d’éléments plagiés ou de tentative de fraude, le ministère ou l'organisme certificateur peut refuser de délivrer la certification. Il peut également à postériori procéder au retrait de la certification ou des parties de la certifications validées par le jury.

Pour conclure, poursuivant sa démarche itérative de déploiement, le décret acte la coexistence des deux modalités de VAE. D'une part, la VAE « nouvelle formule » pour toutes les certifications référencées sur le portail "France VAE" et d'autre part la VAE classique, issue de la loi de 2002 pour toutes les autres certifications.

Interview d'Axel Cournède sur la réforme de la VAE

  • Axel Cournède, conseiller Formation professionnelle et Apprentissage, Ministère délégué chargé de l’Enseignement et de la Formation professionnels